Vivre en camion

J’ai passé l’hiver dans mon vito et oui, j’ai (sur)vécu !

Aujourd’hui j’ai décidé de vous écrire un article différents de ceux de d’habitude. J’ai passé trois mois (de début novembre à début février) dans mon camion, du lundi au vendredi. Cette expérience m’a beaucoup appris, sur moi, sur les autres, sur la manière dont on peut vivre, dont on peut consommer,…

Note : j’ai commencé à écrire cet article cet hiver puis l’ai terminé plus tard, excusez la non concordance des temps.

Quand décide-t-on de vivre en camion ?

Pour commencer, voyons comment j’en suis arrivé là ! Fin octobre dernier, je suis au chômage, je travaille sur le camion, je profite de la vie sans contrainte et je commence à songer à chercher un emploi. C’est un coup de téléphone qui va tout faire basculer (non, vous n’êtes pas en train de regarder tellement vrai, ne vous inquiétez pas). On me propose un job intéressant à prendre très rapidement sur Poitiers. Entretien le mardi et réponse positive le jeudi pour un début le mardi suivant.
Je n’ai pas le temps de chercher de quoi me loger ce week end là et je souhaite quelque chose de temporaire pour plusieurs raisons (CDD, pas certain que le poste me convienne, je ne connais pas la ville,…).
J’ai envie de partir juste avec le camion, l’idée de vivre de cette façon me tente de plus en plus ces derniers temps. Mais l’aménagement est loin d’être terminé et les températures vont à la baisse. Ma mère me « raisonne » et me pousse à faire une demande en foyer de jeunes travailleurs. Je me retrouve donc le soir dans une chambre de 12m2 au 10eme etage d’une vielle tour de cité avec cuisine commune au 1er. L’isolation est très mauvaise, je ne me sens pas du tout chez moi. Rapidement je n’y vais que pour dormir et prendre une douche, je passe ma soirée dans le camion au calme et pour me faire à manger.
Le déclic s’est fait lorsqu’un soir, stationné un peu trop loin du foyer, j’ai eu la flemme de rentrer. Je me suis rendu compte que le froid n’était absolument pas un problème en dormant dans 2 duvets. A partir de ce moment là, j’ai commencé à ne rentrer qu’un soir sur 2 pour prendre une douche, tout en essayant différents moyen de me laver entre temps.
J’ai signé un bail d’un mois mais au bout de 3 semaines ma décision est prise, je ne lâcherais plus un rond pour cette chambre, mon camion me convient très bien !

Vivre en camion c’est une expérience énorme, c’est changer toutes ses habitudes, remettre en cause un certain nombre de choses, sortir de sa bulle de confort. C’est aussi difficile à avouer au départ. Une fois assumé il faut expliquer que non le froid n’est pas un problème et surtout répondre à la question « Pour la douche et les toilettes tu fais comment ? » Ben oui, mon aménagement n’est pas terminé, je n’ai pas de toilettes sèches et pour la douche dans si petit ce n’est clairement pas possible !

L’aménagement actuel du vito

L’aménagement est simple. J’ai ajouté quelques accessoires indispensables : une table ikea pour la cuisine, une poubelle, un miroir, un porte documents et une tringle.

Je dors sur le lit en mode banquette puisque je ne peux pas le déplier, ça ne me gêne pas et je pense que le dossier isole très bien. Inutile d’investir dans un duvet grand froid, mes deux duvets basiques de chez décatlhon suffisent à retenir la chaleur humaine.
Côte rangement le bloc tiroir est ultra pratique, j’ai tout a portée de main. Les caisses en dessous du lit sont pratiques une fois que chaque objet à sa place, je dois juste jouer à tétris pour les sortir.

Ce qui me manque le plus c’est l’évier, j’utilise une bassine avec une bouteille d’eau ou le pulvérisateur.

Pour l’éclairage, la bande led de 5m couplé à une petite batterie 12v est largement suffisante. La luminosité minimum ou presque suffit et la batterie tient ainsi 2 semaines. L’option « blanc chaud »  sur la bande led est importante, plus onéreuse mais bien plus agréable.

La toilette

L’idéal serait d’avoir une douche au travail mais j’ai trouvé un job dans une PME qui n’en n’est pas équipé. Du coup je me suis adapté, mi novembre il faisait  encore bon, je me lavais au gant et à la bassine directement dehors. Lorsque les températures ont commencées à descendre j’ai fait la même chose dans le camion mais c’est difficile de ne pas mettre de l’eau partout. Et puis les températures sont descendues encore plus et ça commençait à cailler donc j’ai investi les toilettes du bureau. Il y a un grand lavabo, de la place et de la chaleur.

J’utilise du savon en bloc type savon de marseille, ça mousse moins que du gel douche, c’est plus rapide à rincer.
Pour les cheveux ça fonctionne aussi mai le cuir chevelu ne vous remerciera pas (c’est peut être parce que j’ai un savon moyen aussi). Un ami m’a fait découvrir la boutique Lush qui fait du shampoing solide naturel,  mieux que le savon 🙂
Se laver de cette manière apprend à économiser l’eau. Avec une bouteille d’un litre rempli d’eau chaude (au travail avant de partir) je fais un shampoing + ma toilette (en rinçant en partie à l’eau froide).
Je parle bien de toilettes des parties les plus « salissantes ». Pour un savonnage complet il faut au moins le double.
Vu les températures et mon job sédentaire, la toilette de chat est suffisante. En été ça ne passerait clairement pas.

La cuisine : comment devenir top chef ou presque

Cuisiner en camion ne se limite pas aux conserves et aux pâtes à la bolognaise ! Avec un peu d’équipement et d’organisation, on peut faire bien plus !

J’utilise un réchaud à 2 feux, un poêle et une casserole. J’ai remplacé la balance par une gobelet réutilisable gradué. En plus de rappeler les festivals de l’été, ce gobelet permet de mesurer ses aliments pour ne pas faire de restes. Eh oui, pas de frigo dans le camion donc pas de conservation ! Pour les produits frais c’est courses tous les soirs ! L’absence de ce petit appareil électroménager oblige à repenser ses habitudes alimentaires : je mange  moins de produits frais (viande, poisson, yaourts) qui sont remplacés  par de la charcuterie sèche (saucisson, chorizo), des compotes ou des fruits. On oublie les sauces (moutardes, mayonnaise) mais aussi le beurre. Ce dernier est remplacé par de l’huile, les classiques olive et tournesol mais aussi l’huile de coco, que j’ai acheté pour l’occasion et qui m’a bien plus. On oublie aussi toute la cuisine au four puisqu’il n’y en as pas (non, je n’ai pas essayé la pizza à la poêle, en revanche vous pouvez y réchauffer un burger). Un autre point qui m’a fait diminuer ma consommation de viande, particulièrement de jambon grillé, lardons et steak, c’est l’odeur ! Dormir avec l’odeur de cochonaille, qui imprègne également tous les vêtements, ce n’est pas super agréable.

Pour la cuisine en elle même c’est comme à la maison ou presque, le réchaud gaz est un peu moins puissant (mais plus agréable qu’une plaque électrique), le plan de travail plus petit et les ustensiles moins nombreux. Cuisine impliquant vaisselle, j’essaye de cuire mes aliments au maximum dans un seul récipient. Les plats à base de riz ou de pâtes sont très pratique pour cela. Je vous invite à tester les one pot pasta, une fois maîtrisé c’est rapide et succulent.

Les soirs ou la motivation n’est pas présente il reste les classiques conserves de raviolis ou de cassoulet. Pour les soirs encore plus durs il y a les fast-food, en 3 mois c’est m’est arrivé 4 ou 5 fois.

Les assiettes et les verres ne sont pas sortis souvent du tiroir, vaisselle réduite au minimum : manger à la casserole et boire à la bouteille ça n’a tué personne ! Surtout,  une fois que le repas est terminé, il ne faut pas traîner à faire la vaisselle avant que ça n’accroche. C’est moins d’eau, moins de temps et moins de froid. En effet j’évite de faire chauffer l’eau de la vaisselle si ce n’est pas nécessaire et j’essaye de faire la vaisselle dehors pour éviter de salir le camion. Lorsqu’il fait trop froid je reste à l’intérieur mais l’eau à 4-5° n’est pas très agréable donc je fais vite. Le pulvérisateur est un très bon allié pour l’économie d’eau lorsque l’on a pas d’évier.

Dernière chose, il faut penser à essuyer vitre et pare brise car la condensation se forme très vite à cette période. Avec les températures négatives de la nuit cette condensation gèle et ce n’est pas très pratique le matin….

Le froid : comment s’en protéger et vivre avec ?

En cette période hivernale le plus embêtant c’est le froid. Je n’ai pas suivi scrupuleusement les températures, j’ai préféré me baser sur mon ressenti plutôt que sur des chiffres. La sensation de froid le corps s’y habitue, on finit par s’y faire, jusqu’à une certaine limite bien sur.

Pour dormir mes 2 duvets étaient suffisant. Lors de la période la plus froide j’ai ajouté une couverture au niveau de mes pieds, partie du corps la plus froide la nuit.  Inutile de se couvrir avec des vêtements, en caleçon dans le duvet c’est le plus efficace !

Le réveil est le plus difficile, il doit faire un bon 20-25°C dans le duvet et le thermomètre indiquait 3-4°C dans le camion. L’unique raison pour laquelle je surveillait la température c’était pour le réchaud gaz, qu’il m’est arrivé d’allumer quelques minutes le matin avant de sortir du duvet. Je l’ai également fait de rares fois le soir, après avoir acheté un détecteur de monoxyde de carbone pour ma sécurité.

Les 10 première minutes de la journée sont donc les plus mauvaises : il faut sortir de son nid douillet, s’habiller avec des vêtements  froids et sortir dehors pour aller aux toilettes (enfin au buisson). Une fois cela fait, je me réchauffe avec un bon chocolat chaud ! Le soir le chauffage durant les 10-15 minutes de route réchauffe l’habitacle et la cuisine fait monter la température. Ensuite je me réfugie dans le duvet.

Comment se passer d’eau courante et d’électricité ?

Et bien on ne s’en passe pas vraiment, on fait différemment. Pour l’eau j’utilisais plusieurs bouteilles remplies régulièrement (au travail)  pour boire, faire la cuisine et la vaisselle.  J’avais également un bidon de 5L en cas de besoin, pour une grosse vaisselle ou pour me laver dehors. Les bouteilles ont l’avantage de pouvoir être manipulées très facilement.

Pour l’électricité on commence par diminuer les consommateurs :

  • Eclairage : une bande led au minimum de sa luminosité ou presque, alimentée par une batterie auxiliaire. Cette batterie est rechargée sur secteur toutes les 2 semaines le week-end.
  • Téléphone : une batterie externe 12000 mAh, rechargée au travail
  • Ordinateur : autonomie de la batterie pour la soirée (2h environ pour le mien). Donc j’apprend à m’en passer 😀
  • Internet : forfait 4G 7Go sur le téléphone
  • Frigo, congélateur, grille pain, HiFi, télé, machine à laver…. On apprend à s’en passer, c’était fait avant pour tous sauf le frigo et la HiFi. La musique c’est d’ailleurs ce qui m’a manqué le plus. Pour la machine à laver j’ai continué mon rythme étudiant : chez mes parents le week-end.

Bilan de l’expérience

J’ai très bien vécu ces trois mois de vie « nomade » et je recommencerais sans hésiter ! Vivre dans un fourgon petit format dans lequel on ne tient pas debout c’est tout à fait possible. Certes c’est bien plus agréable dans un fourgon plus grand mais cela ne m’aurait pas permis d’accéder à mon parking fétiche, protégé par une barre à 2m.

Vivre avec peu permet de se recentrer sur l’essentiel. Pour vivre convenablement il suffit de posséder de quoi dormir, manger et se laver. Le reste c’est du loisir et du confort, ne l’oublions pas.

Pour vivre à l’année, un chauffage est indispensable et son installation dans un si petit format est complexe. Il faut se tourner vers des système à carburant. Toutefois pour du dépannage il est possible de faire sans. J’ai tenu dans ces conditions jusqu’à fin janvier. Deux semaines avant mon aménagement j’ai pris un airbnb pour une semaine. Les températures descendaient trop, mon pare brise gelait de l’intérieur quoique je fasse et je commençais à avoir des difficultés à maintenir une température correcte le soir.

Sur l’aspect économique ce mode de vie est intéressant : pas de loyer, pas de taxe d’habitation, pas de facture d’électricité,…. En contrepartie on roule plus, donc d’avantage de frais en carburant, péage, mécanique,…

Il y a aussi des inconvénients :

  • Pas d’adresse fixe, j’utilisais celle de chez mes parents
  • Pas de stockage : il faut (ré)apprendre à ne pas consommer. Adieu accumulation, collection, « j’achète c’est trop beau /(in)utile, ça servira peut-être un jour,….
  • Lorsque le véhicule est en panne c’est compliqué. J’ai du squatter chez des amis pendant 3 jours lors du changements des joints d’injecteurs.

Aujourd’hui cela fait presque 4 mois que j’ai retrouvé un appartement et j’utilise le camion le week-end. L’appartement est appréciable mais il ne me permet pas d’aller dormir après un soirée trop arrosée loin de chez moi, de me réveiller au bord de la plage ou encore de passer des soirée mémorables avec mes amis. Désormais bien souvent je me rend compte qu’il me manque tel ou tel objet parce que je l’ai laissé à l’appartement. Je n’avais pas ce problème avant car je me promenais avec ma maison !

Cependant vivre en camion lorsque l’on a un travail sédentaire reste moins intéressant que lorsque notre travail nous amène à nous déplacer énormément. Je suis dans le premier cas et c’est pour cela que j’ai préféré un appartement à un nouveau camion 🙂

 

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